Aller au contenu principal

Mady Keita, invisible mais indispensable

En 20 ans de métier, Mady Keita en a vu des changements. Perché sur les marchepieds des camions poubelles, cet agent de collecte chantelouvais est le premier témoin de la sensibilisation des riverains aux enjeux environnementaux. Pour Infoloup, celui qui agit dans l’ombre pour le bien collectif a accepté, pour une fois, un peu de lumière. Embarquons à ses côtés le temps d’une tournée à Chantelouples-Vignes.

Certains ne le remarquent même pas et pourtant son travail conditionne en grande partie la qualité de vie de tous. En prise directe avec le froid et le vent d’hiver ou sous les chaleurs caniculaires de ces derniers étés, Mady Keita, 51 ans, écume depuis 20 ans la Boucle de Chanteloup pour collecter les déchets du quotidien. Employé par l’entreprise Nicollin, délégataire de service public pour le ramassage des déchets, il est l’un des deux « ripeurs » (NDLR : « éboueur » dans le langage commun) accrochés à l’arrière du « camionpoubelle ».

Il est 11h lorsque la benne décolle de la zone des Cettons où est installée la nouvelle plateforme de l’entreprise Nicollin. La mission du jour: collecter le verre dans toute la commune. Fort de son expérience, Mady Keita maîtrise la routine de A à Z. Depuis son marchepied, il scrute attentivement les trottoirs pour repérer les bacs à ordures disposés sur le tracé. Sans relâcher son attention sur la circulation qui l’entoure, il accumule les allers-retours dans un cliquetis de bocaux et bouteilles. « C’est un métier très physique, ça enchaîne tous les dix mètres », pointe le quinquagénaire rodé à la tâche. Avant d’être embauché par Nicolllin, Mady Ketia occupait les mêmes fonctions pour l’entreprise Sepur, et, encore avant cela, pour la société Véolia.

Bien qu’il exerce cette profession depuis 2002, il en découvre, depuis quelques mois, une nouvelle facette. Grâce à l’installation récente de son employeur à Chanteloup-les-Vignes, chaque vendredi, Mady Keita est dépêché dans la ville dans laquelle il est installé avec sa famille depuis 13 ans. Habitué des tournées très matinales à l’abri des regards, ce père de quatre enfants ne cache pas son plaisir de retrouver un peu de relationnel dans son quotidien, qui plus est avec des visages familiers. « À Chanteloup, je connais pas mal de gens, quand je passe ils nous saluent, nous demandent comment ça va, si ce n’est pas trop dur, on apprécie, explique-t-il dans sa combinaison jaune fluorescente. Avec ces tournées à Chanteloup, j’ai aussi découvert des endroits de la ville que je ne connaissais pas vraiment, des gens que je n’avais jamais vus me saluaient !».

Si ces horaires le poussent fatalement à devoir aussi faire face aux usagers insatisfaits ou aux automobilistes qui s’impatientent derrière son camion, Mady Keita garde toujours son calme. Le ripeur préfère en effet se concentrer sur la bienveillance des autres. « De ce côté-là, il y en a beaucoup qui sont compréhensifs vis-à-vis de l’activité qu’on fait, parce que dans les villes ou dans les pays où les éboueurs sont en grève, on voit comment ça se passe donc les gens montrent de la reconnaissance, suppose l’agent de collecte. Quand j’ai choisi de travailler dans la poubelle, c’était d’abord pour gagner ma vie mais aussi pour faire un travail où on se sent utile pour les autres. Moi, c’est comme ça que je vois la vie, je travaille pour les gens parce que je suis conscient que d’autres travaillent pour moi ».

Et puis plus loin, près du Parking des Ouches, lorsqu’un petit garçon aperçoit le camion de collecte se rapprocher de lui, la magie opère. L’un sur son vélo les yeux plein d’admiration, l’autre lui adressant ce sourire plein d’humilité qui le caractérise en sautant de sa plateforme. Mais comme toutes les rencontres de Mady en tournée, le moment est très bref : un bonjour, un geste de la main et le ripeur s’envole déjà vers la prochaine maison.

Parmi les raisons qui l’ont poussé à embrasser la carrière d’agent de collecte, Mady Keita met également en avant sa sensibilité sur les questions liées à l’environnement. « On travaille pour nous, pour la collectivité, mais aussi pour l’environnement et la planète, souligne fièrement le ripeur. Notre métier a encore plus de sens aujourd’hui ! »

Constatant l’évolution de comportement de la population dans la gestion de leurs déchets, Mady Keita se réjouit du chemin parcouru. « Il y a dix, quinze ans, les gens faisaient vraiment n’importe quoi, rien n’était trié, se souvient-il. Aujourd’hui, ça commence à changer, les personnes commencent à comprendre le tri, pourquoi c’est important, ce qu’il faut faire, ce qu’il ne faut pas faire, et aussi qu’il faut produire moins de déchets ».

Mise à jour
07/11/2022